Le besoin (est plus fort que la honte)

Dans l’intestin de Gigapolis,

Dix millions de fourmis éduquées

Et de visages qui jaunissent

Se rassemblent comme à l’accoutumée.

 

Odeurs de sueur et de pisse,

De parfums bourgeois et de fumée

Les bactéries sentent propice

Le merveilleux moment d’attaquer.

 

 

Dix mètres sous terre, les rails rugissent

Les fourmis sont déjà agglutinées

Voilà la chenille qui s’immisce

Par l’orifice prévu à cet effet.

 

Soixante mille fourmis s’enfouissent

Dans ces entrailles où sont consignées

En rang d’oignon et sans malice

Des colonies d’âmes résignées.

 

 

Fuyant tous les regards complices

Qui leur renverraient leur propre reflet

Elles attendent qu’enfin se finisse

Cette journée sans intérêt.

 

Sûr que demain aura le vice

De leur faire offrir le même attrait

Leur vie est faite d’artifices

Qui leur font croire qu’elles sont comblées. 

 

 

(le besoin, le besoin, le besoin)

D’autres âmes, elles, se nourrissent

De quelques notes désaccordées (le besoin… honte)

Certaines d’entre elles sont bien novices,

Elles disent : « le besoin est plus fort que la honte » (honte, honte)

 

Quand elles évitent la police

C’est alors la faim qu’elles doivent tromper

Et trouver un carton bien lisse

Pour s’en faire un p’tit lit douillet.

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